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Edition Conception Réalisation: OSEP
Rédaction: SAMU 68
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Dr F. STIERLE
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Examiner - Décider - Rassurer - Expliquer - Écouter

Le traumatisme crânien représente un motif fréquent de consultation au service d'urgence. Dans la majorité des cas chez l'enfant, Il s'inscrit dans la cadre d'une chute. Anxiogène mais fort heureusement bénin dans 80 % des cas, il engendre néanmoins très facilement une panique au soin de l'entourage de la victime, motivant une évacuation sanitaire dans la précipitation avec un minimum de renseignements qualitatifs lors du message d'alerte et de demande de secours. Une fois en secteur hospitalier, la radiographie du crâne constitue le premier motif de demande de soins. Rassurante pour les parents si normale, elle constitue une sorte de thérapeutique Indirecte mais ô combien efficace psychologiquement lorsqu'un retour domicile est proposé après un examen clinique complet.

LA RADIOGRAPHIE DU CRÂNE: UNE RADIOTHÉRAPIE

La dernière Conférence de Consensus Nationale qui s'est déroulée en 1990 a permis de clarifier la conduite à tenir en présence d'un traumatisé du crâne en insistant sur la nécessité absolue d'un examen clinique et neurologique complet. Ainsi, aujourd'hui, c'est la clinique qui prime sur la réalisation d'examens complémentaires tels que les examens d'imagerie médicale. Enfin, dans le cas oÙ l'examen clinique justifie la mise en route d'investigations complémentaires, c'est préférentiellement le scanner cérébral avec fenêtres osseuses qui représente l'examen de choix à effectuer en urgence.

EN PRATIQUE : LE TRAIT DE FRACTURE NE FAIT PAS LA GRAVITÉ.

Les experts médicaux réunis lors de la conférence de Consensus ont mis en place un schéma type de conduite à tenir qui sert maintenant de modèle dans tous les services d'urgence et basé sur la non réalisation systématique de radiographies du crâne devant un traumatisme crânien. Les études effectuées à travers le monde sur ce sujet ont prouvé que la constatation d'une fracture du crâne lors d'une radiographie ne modifiait pas, en bien ou en mal, l'évolution du traumatisme crânien. Ce n'est pas le trait de fracture qui fait la gravité du traumatisme, ce qui importe ce n'est pas la boite crânienne que l'on voit sur des radiographies mais c'est son contenu cérébral, ce dernier étant non visible sur un cliché classique. Classé de ce fait au rang des examens fatigants, coûteux et inutiles, la radiographie du crâne ne doit plus être réalisée dans un service d'urgence en présence d'un traumatisme crânien reconnu comme bénin. De plus, une radiographie du crâne normale est faussement rassurante et peut conduire à une erreur de prise en charge.

DOCTEUR : MON FILS EST TOMBÉ SUR LA TÊTE, POURQUOI EST-CE QUE VOUS LUI CHATOUILLEZ LA PLANTE DES PIEDS ?

L'examen médical aux urgences implique une grande rigueur dans sa réalisation et sa retranscription écrite au niveau du dossier médical car il sert d'examen de tous les appareils en insistant plus particulièrement au niveau du crâne (recherche d'une plaie du cuir chevelu, d'un oedème, d'une déformation) de l'appareil locomoteur (contusion ou fracture associée) et au niveau de l'appareil nerveux.

Ce dernier examen regroupe l'étude de divers paramètres tels que la conscience (classification de Glasgow), l'examen des nerfs crâniens (pupilles, motricité et sensibilité au niveau du visage), l'examen des nerfs rachidiens (sensibilité et motricité et réflexes au niveau des membres) et enfin l'examen de l'équilibre. La constatation d'une anomalie lors de cet examen justifie alors la mise en route d'un seul et unique examen complémentaire : l'examen scannographique du crâne et de son contenu.

- UNE HIÉRARCHIE : 3 ÉCHELLES - 1 CONDUITE A TENIR.

Échelles n" 1 : Échelles du risque lié au mécanisme du traumatisme
La nature des lésions se trouve directement liée à l'importance des forces mises en jeu et des circonstances de survenue du traumatisme. En effet, l'énergie dissipée lors de l'accident peut être à l'origine de lésions directes focales mais également indirectes par déplacement de la masse cérébrale à l'intérieur de la boite crânienne : foyers de contusion hémorragique, lésions diffuses des fibres nerveuses. Ainsi le clinicien s'appuiera sur la recherche de circonstances déclenchantes comportant une forte énergie cinétique comme une accélération ou une décélération, la chute d'une hauteur importante.

Échelles n" 2 : Glasgow, l'échelle de toutes les consciences.
Cette échelle d'utilisation très simple permet l'appréciation clinique rapide de l'état neurologique d'un patient grâce à trois paramètres : l'ouverture des yeux, le langage, le mouvement.

yeux-langage, mouvement: un score de 3 à 15.
Selon la réactivité à chacun de ces trois paramètres, un indice précis sera attribué. La somme des trois indices correspond au score de Glasgow proprement dit. Plus le score est élevé et plus les réponses observées sont proches de la normale.

On peut ainsi déjà classer le traumatisme crânien en 3 groupes à partir de cette étape:
Groupe 1 : Traumatisme crânien léger: score de Glasgow
> à 13,
Groupe 2 : Traumatisme crânien
modérée 9
< score de Glasgow < 12,
Groupe 3: Traumatisme crânien sévère : Score de Glasgow
< 8.
Échelles no 3: Échelles de Masters.
Le but de cette échelle est de déterminer de façon précise les groupes de gravité et la conduite à tenir aux urgences à partir de l'évaluation de certains critères. Ces différents critères repris lors de la Conférence de Consensus ont permis d'établir un algorithme de prise en charge spécifique. Cette dernière échelle ne remplace pas l'échelle issue du score de Glasgow mais la complète utilement en introduisant la notion de risque faible, modéré ou élevé lié au traumatisme crânien.

- L'ESSENTIEL

La hiérarchie de l'examen du petit traumatisé du crâne aux urgences ou au cabinet de médecine générale garde les mêmes principes dans sa réalisation.

PAS DE RADIO - EXAMINER - ÉCOUTER - EXPLIQUER - SURVEILLER

20 % des traumatismes crâniens présentent une lésion crânienne ou encéphalique et la fréquence de ces lésions se trouve directement corrélée avec l'importance de l'altération du score de Glasgow. Par ordre de fréquence on retrouve parmi ces lésions l'abord les fractures et les contusions, les saignements à l'intérieur du cerveau (hématomes) ou entre le cerveau et la boite crânienne. L'absence de lésion osseuse constitue un mauvais indicateur de l'absence de lésion intracrânienne.

Ainsi un examen scannographique sera systématiquement prescrit en présence d'un traumatisé du crâne avec une obnubilation (la victime a du mal à répondre à des questions simples) et une atteinte neurologique constatée lors de l'examen. Par contre toute victime qui aura présenté des vomissements, une perte de connaissance et des maux de tête persistants justifiera d'une simple surveillance en milieu hospitalier avec réalisation d'examens cliniques répétés à intervalles réguliers. Un scanner sera ainsi mis en route lors de la surveillance devant l'existence d'une altération progressive du score de Glasgow, l'installation d'un déficit neurologique et devant l'absence d'amélioration clinique au bout de 24 à 72 heures d'hospitalisation.

LA CONDUITE A TENIR SE RÉSUME EN 3 POINTS :

Patients appartenant aux groupes 1 et 2 de Masters (risque faible ou modéré) - score de Glasgow à 15 :
Pas d'examen d'imagerie médicale
simple surveillance.
En cas d'aggravation secondaire un seul examen - le scanner.

Patients  appartenant au groupe 3 de Masters (risque élevé) - score de Glasgow entre 3 et 12
D'emblée un seul examen : le scanner

PAS DE RADIOGRAPHIE - L'URGENCE C'EST L'EXAMEN MÉDICAL

Dans la plupart des cas, l'examen d'un traumatisé crânien qui n'a pas perdu connaissance et qui répond par des réponses adaptées, bouge ces 4 membres, n'implique pas le transport systématique vers un centre hospitalier. Quant à la classique plaie du cuir chevelu, elle saigne beaucoup, produit un effet de panique généralisée dans l'entourage de la victime mais reste bénigne dans 99 des cas en l'absence de troubles de cl conscience. Un médecin généraliste libéral représente alors une solution médicale par la même amplement suffisante dans le cadre d'une prise en charge d'un traumatisme crânien avec ou sans perte de connaissance initiale et en l'absence de déficit neurologique. Dans le cas où la perte de connaissance est retenue comme réelle, celui-ci dirigera le traumatisé vers une hospitalisation de courte durée pour simple surveillance.

LA SURVEILLANCE A DOMICILE

Neuf enfants sur dix victimes d'un traumatisme crânien pourront rentrer à domicile. Dans tous les cas où ce retour à domicile sera envisagé et lorsque les parents auront bien assimilé l'importance de la surveillance, le patient quittera le service avec une fiche explicative des modalités de surveillance et des numéros d'urgence à appeler en cas d'aggravation de l'évolution

EN CAS DE DOUTE: UN CONSEILLER DE CHOIX - CHIFFRER LE 15 !

De jour comme de nuit 24 heures sur 24, 365 jours sur 365, Il est possible de trouver une écoute et un conseil médical par téléphone. Chiffrer le 15 ne signifie pas obligatoirement le déplacement d'une ambulance de réanimation suivie d'une hospitalisation. Après interrogatoire téléphonique, un médecin du SAMU conseillera la conduite à tenir optimale en fonction des renseignements fournis par l'appelant : cela pouvant consister en un simple renseignement médical, au déplacement d'une ambulance, ou d'une simple consultation chez un médecin de famille.

CONCLUSION

Le scanner qui s'est largement imposé en traumatologie crânienne depuis les 20 dernières années reste l'examen d'imagerie nécessaire et suffisant pour l'exploration d'un traumatisé crânien après réalisation d'un examen clinique rigoureux. Les -
classiques radiographies du crâne n'ont pratiquement plus aucune indication médicale et entraînent un surcoût en matière d'économie de la santé.
L'examen neurologique et l'utilisation de l'échelle des comas de Glasgow sont indispensables pour évaluer la gravité d'un traumatisme crânien et permettent dans la plupart des cas d limiter le nombre d'hospitalisations abusives alors qu'une simple surveillance à domicile par un membre de l'entourage correctement informé suffit.

Dr Pascale SCHMITT
Médecin-Assistant
SAMU-SMUR-URGENCES


ALGORITHME DE PRISE EN CHARGE DU TRAUMATISME CRÂNIEN
(6ÈME CONFÉRENCE DE CONSENSUS EN RÉANIMATION ET MÉDECINE D'URGENCE)

  TRAUMATISÉ CRÂNIEN  
GROUPE 1 GROUPE 2 GROUPE 3
Pas de radiographie du crâne En l'absence de scannographie :
Radiographie du crâne possible
Surveillance clinique
Pas de radiographie du crâne
Retour au domicile avec surveillance
et Information
Pas de signes de gravité et amélioration  
Si surveillance à domicile impossible:
hospitalisation brève
Signes de gravité et ou aggravation Scannographie et milieu neurochirurgical


TABLEAU 1 SCORE DE GLASGOW

OUVERTURE DES YEUX RÉPONSE VERBALE RÉPONSE MOTRICE
E V M
Spontanée 4 Normale, orientée et claire 5 Volontaire ou commandée 6
A l'appel et au bruit 3  Confuse 4 Orientée et adoptée 5
A la douleur 2 Inappropriée 3 Retrait du membre (évitement) 4
Jamais Incompréhensible 2 Flexion stéréotypée du membre 3
1 Absence Extension stéréotypée du membre 2
    Absence


TABLEAU 2 : CLASSIFICATION DE MASTERS DES TRAUMATISMES CRÂNIENS

GROUPE 1 (risque faible)

Signes Patient sans symptôme
Maux de tête
Sensation de vertiges
Hématome, blessure, contusion du cuir chevelu
Absence de signe de groupe 2 et 3
Conduite
à tenir
Il n'y a pas lieu de-Prescrire une radiographie.
Il est impératif en revanche :
- de retranscrire l'examer clinique par écrit,
- d'informer le patient verbalement et par écrit de la surveillance à réaliser au domicile pour les jours suivants.
Si la surveillance est possible, le retour à domicile est autorisé

GROUPE 2 (risque modéré)

Signes - Histoire peu fiable des circonstances de l'accident,
- Prise de substance pouvant interférer avec la conscience (alcool, drogue...
- Suspicion de fracture clinique
- Lésion pénétrante
- Modification de la conscience au moment de l'accident ou dans les suites immédiates ou amnésie après l'accident,
- Crise d'épilepsie ou convulsions après l'accident,
- Vomissements
- Maux de tête progressivement croissants.
Conduite
à tenir
Centre hospitalier sans scanner : radiographie du crâne classique : la présence d'un trait de facture est alors un motif de transfert vers un centre hospitalier disposant d'un scanner.
Dans les centres hospitaliers disposant d'un scanner, 2 attitudes sont possibles :
- soit simple surveillance (24 à 48 heures habituellement) et réalisation d'un scanner selon l'évolution,
- soit scanner d'emblée avec retour à domicile si le scanner est normal avec instructions écrites de surveillance.

GROUPE 3 (risque élevé)

Signes - Altération du niveau de conscience
- Diminution progressive de l'état de conscience
- Signes neurologiques
- Plaie pénétrante
- Modification du relief osseux lors de la palpation
- Polytraumatisme : minimum 2 lésions avec mise en Jeu du pronostic vital
Conduite
à tenir
- Radios du crâne inutiles
- Scanner en urgence et transfert en neurochirurgie selon les données du scanner.


EXEMPLE DE DOCUMENT A REMETTRE AUX PATIENTS

Madame, Monsieur,

Une personne de votre entourage vient d'être victime d'un traumatisme crânien. L'examen effectué par le médecin des urgences est rassurant : le retour à domicile est sans risque. Néanmoins, votre surveillance sera attentive pendant les quarante-huit heures.

Durant la journée, surveillez son comportement:

- est-il somnolent ?
- a-t-il des troubles de la conscience ?
- a-t-il son activité et ses jeux habituels.?
- présente-il des troubles de l'équilibre ou des vertiges lors de la marche ?
- présente-t-il des difficultés à bouger un bras ou une jambe ?

Durant la nuit, vous devez le réveiller toutes les trois heures pour vérifier sa conscience (voir s'il vous répond correctement)

Votre surveillance portera aussi sur son état général :

- vomit-il fréquemment ?
- souffre-t-il d'un mal de tête, de façon intense et prolongée, ne cédant pas au suppositoire ou au cachet de Doliprane (ne lui donnez pas d'aspirine) ?
- pleure-t-il ou gémit-il sans cesse ?
- se plaint-il de voir trouble ou louche-t-il ?

Dans le cas de l'apparition d'un ou de plusieurs de ces signes, il convient de prendre contact rapidement avec un médecin quelle que soit l'heure du jour ou de la nuit et de ramener la victime vers un hôpital afin d'effectuer des examens complémentaires.

Pour cela, vous pouvez joindre :
- votre médecin de famille,
- les urgences de l'hôpital le plus proche de votre domicile
- le SAMU en composant le 15

Le Médecin du service

Des radiographies du crâne ont été effectuées
Des radiographies du crâne n'ont pas été effectuées